Alors que l’Assemblée nationale avait ratifié le plan de déconfinement en première lecture par 368 voix contre 100, et 103 abstentions, le Sénat a rejeté ce plan à la surprise générale. Un véritable camouflet pour le gouvernement d’Emmanuel Macron.
Un vote symbolique du Sénat ?
Le Sénat a rejeté le plan de déconfinement présenté par le premier ministre Edouard Philippe. Les Républicains ont joué un rôle déterminant dans le rejet de ce texte : ils se sont majoritairement abstenus (135) et 7 ont voté pour. Avec 89 voix contre 81 et 174 abstentions, le plan de déconfinement a été rejeté. Quelles conséquences pour l’exécutif ?
A priori, les conséquences sur l’adoption du texte ne seront pas si dévastatrices que ça. Les députés et les sénateurs sont consultés pour discuter du plan de déconfinement mais leur vote n’a qu’une valeur symbolique. En application de l’article 50-1 de la constitution française, il s’agit uniquement d’un avis consultatif des représentants nationaux : il n’y a donc pas d’impact direct sur le plan de déconfinement prévu pour le 11 mai.
» Devant l’une ou l’autre des assemblées, le gouvernement peut, de sa propre initiative ou à la demande d’un groupe parlementaire (…) faire sur un sujet déterminé, une déclaration qui donne lieu à un débat et peu, s’il le décide, faire l’objet d’un vote sans engager sa responsabilité«
Qu’implique le rejet du plan de déconfinement ?
Le rejet symbolique du plan de déconfinement est une alerte politique claire et synonyme de défiance. La sénatrice du PS, Laurence Rossignol explique que le rejet du plan de déconfinement est un signal lancé au gouvernement :
» Changez votre méthode, votre façon de faire. Ayez confiance en les Français. Cessez de nous raconter des histoires qui se révèlent après ne pas être vraies. Cessez d’être aussi affirmatifs quand vous n’avez pas raison de l’être « .
Même son de cloche du côté de Bruno Retailleau, le chef du parti Les républicains au Sénat a expliqué quant à lui d’un ton plus nuancé :
« Notre bienveillance, vous l’avez. Mais la confiance que vous nous demandez, nous ne pouvons pas vous la donner si facilement parce que votre parole a fait l’objet de trop de contradictions et de contre-vérités.«
Le ton est donné : dans une crise sanitaire sans précédent, l’unité nationale se délite et le rejet du plan de déconfinement n’est qu’un premier avertissement de la part du corps politique.
Premier avertissement d’un côté et défiance de l’autre : le rejet du plan de déconfinement est loin d’être anodin. Les sénateurs proches des maires vivent mal un ensemble de mesures prises par Emmanuel Macron.
Pour Luc Rouban, directeur de recherche au CNRS, c’est la décentralisation qui est enjeu.
« Le problème est que vous avez un conflit endémique parce que les maires et les sénateurs ont le sentiment qu’Emmanuel Macron a recentralisé les pouvoirs des collectivités vers l’État« , ajoute-t-il.
Le rejet du plan de déconfinement met un coup d’arrêt à la volonté d’Emmanuel Macron de créer une forme d’union nationale en ces temps de crise. En tentant d’insuffler une nouvelle façon de gouverner, Emmanuel Macron se heurte de plein fouet aux élus locaux, une défiance qui pourrait avoir des conséquences plus graves à l’avenir.